La steppe jaune s'étale à perte de vue. Là où elle bute sur le ciel couleur d'acier se découpent les ruines de la ville d'Agdam. Prise aux Azerbaïdjanais dans la première guerre du Karabakh, elle n'a jamais été repeuplée par les Arméniens. Selon l'accord signé entre Bakou et Erevan, sous l'égide de Moscou, lundi dernier, ce district du Haut-Karabakh contrôlé par les indépendantistes arméniens doit être rétrocédé à l'Azerbaïdjan vendredi. Les ruines, les champs labourés par les obus, les jardins de grenades à perte de vue que personne n'a pu cueillir cette année… Et les lignes de défense, installées là depuis près de trente ans, sur la ligne de contact entre les territoires ennemis - des kilomètres de tranchées, des centaines de positions d'artillerie et de casemates.
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«Il n'y aura plus rien ici, ce sera l'Azerbaïdjan», déplore le sergent-chef Artur en scrutant l'horizon les yeux plissés. «Nous n'emporterons pas grand-chose en partant. Les munitions qui nous restent, nos effets personnels. Et nos souvenirs», soupire le canonnier de 31 ans. Lui n'a nulle part où rentrer. Son village, Aknaghbyur, à quelques kilomètres de Chouchi, n'est plus en Arménie. Le premier jour de la guerre, le 27 septembre, il a envoyé ses mère, épouse et enfant à Tsakhkadzor, au nord d'Erevan, po