Turquie : à peine acquitté dans le procès de Gezi, Osman Kavala visé par un mandat d'arrêt
Un tribunal turc a acquitté, mardi, plusieurs figures majeures de la société civile accusées de "tentative de renversement du gouvernement" lors de la révolte du parc Gezi, en 2013. Parmi eux, le fameux mécène Osman Kavala. Quelques heures plus tard, un procureur a émis un nouveau mandat d'arrêt contre lui.
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"En l'absence de preuves suffisantes" pour appuyer les accusations de "tentative de renversement du gouvernement", le tribunal de Silivri, près d'Istanbul, a acquitté Osman Kavala et huit co-accusés qui comparaissaient, mardi 18 février, dans un procès sur leur implication dans le mouvement antigouvernemental du parc Gezi en 2013. Quelques heures plus tard, un nouveau mandat d'arrêt a été émis contre le célèbre mécène Osman Kavala, qui a déjà écopé de deux ans de prison dans le cadre de cette enquête. Cet homme d'affaires et philanthrope de 63 ans, connu des cercles intellectuels en Europe, était notamment accusé d'avoir financé le mouvement de Gezi. Il risquait la prison à vie. Mardi soir, il se trouvait placé en garde à vue au siège de la police antiterroriste à Istanbul, dans le cadre d'une enquête liée à la tentative du coup d'État visant le président Erdogan en 2016.
Son emprisonnement a fait d'Osman Kavala le symbole de la répression orchestrée contre la société civile en Turquie, en particulier depuis une tentative de putsch en 2016 contre le président Recep Tayyip Erdogan, suivie de purges massives.
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En décembre, la Cour européenne des droits de l'Homme avait réclamé la libération immédiate d'Osman Kavala, soulignant l'absence de "faits, informations et preuves" dans l'acte d'accusation. Parmi les éléments de l'accusation figurait une carte de la répartition des abeilles sur le territoire turc, trouvée dans le téléphone de M. Kavala. Le document a été présenté comme une preuve que le mécène entendait redessiner les frontières du pays.
Le président Erdogan a plusieurs fois attaqué nommément Osman Kavala, l'accusant de "financer les terroristes" et d'être "le représentant en Turquie" du milliardaire américain d'origine hongroise George Soros, bête noire de plusieurs dirigeants autoritaires dans le monde. La décision rendue mardi intervient quelques jours après l'acquittement de la célèbre romancière Asli Erdogan dans un autre procès symbolique, où elle était accusée d'activités "terroristes".
Société civile prise en étau
La décision initiale d'acquittement dans le procès des militants du parc Gezi a été accueillie par des applaudissements à tout rompre dans l'enceinte du tribunal de Silivri, selon la journaliste de l'AFP. Ce procès a suscité la vive inquiétude des ONG et des pays occidentaux sur les libertés en Turquie. Pour nombre d'ONG, ce procès, qui reposait sur peu d'éléments concrets, visait à intimider la société civile pour dissuader toute nouvelle manifestation d'envergure contre M. Erdogan, qui dirige depuis 2003 la Turquie d'une main de plus en plus ferme. Signe que le procès était suivi de près à l'étranger, le Conseil de l'Europe, dont Ankara est membre, ainsi que les États-Unis et l'Allemagne ont salué la décision d'acquittement par la justice turque.
Le "procès de Gezi" était emblématique des pressions croissantes contre la société civile en Turquie, en particulier depuis une tentative de putsch en 2016 contre M. Erdogan suivie de purges massives. Les acquittements de mardi interviennent ainsi à la veille de la reprise d'un autre procès emblématique, celui de plusieurs défenseurs des droits humains, dont le président honoraire d'Amnesty International en Turquie, jugés pour "terrorisme".
>> À voir : en Turquie, que reste-il de la révolte de Gezi ?
Avec AFP
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